Être romancier selon Haruki Murakami, c’est avoir de la persévérance, de l’endurance, du courage, de la patience, mais aussi de la distance par rapport à la critique. Les passages les plus intéressants sont à mon sens ceux qui expliquent tout le travail de réflexion qu’Haruki Murakami a eu autour de ses personnages.
L’importance des personnages de “méchant”
Pendant longtemps, il se laissait guider par eux, et ne prenait pas la peine de créer de personnages négatifs. Il explique qu’il trouvait dans la littérature un refuge, une sécurité, et qu’il n’avait donc aucune raison de se mettre en danger avec des personnages de « méchants », jusqu’au jour où quelqu’un lui a fait la réflexion. Avec le temps, il a compris l’importance de la dualité et de la complexité des relations entre les personnages pour créer une histoire plus profonde. Il parle même de « maturité » et reconnaît que la variété de personnages lui a permis de donner à ses textes une ampleur bien différente.
La palettes des points de vue
En plus de renforcer ses typologies de personnages, il s’est mis à élargir sa palette de points de vue. Alors qu’il n’utilisait presqu’exclusivement que la première personne pour raconter ses histoires, il a essayé la troisième personne : « J’ai réussi à donner à mes personnages des couleurs différentes, à leur faire endosser toutes sortes d’opinions et de points de vue, et je les ai décrits dans toute leur diversité. Mais le plus merveilleux, c’est qu’au fond je pouvais être n’importe lequel d’entre eux. » Plus les personnages sont complexes, plus ils sont humains, ambigus et crédibles. Plus les personnages sont ancrés, et plus ils échappent à leur auteur. C’est ce qu’a fini par ressentir Murakami.
Quand les personnages échappent à leur auteur
J’ai longtemps renié cette idée mystique de l’écrivain qui dit ne plus contrôler ses personnages. Mais un jour, j’ai compris ce que les écrivains ne disent pas : si l’auteur n’a plus de contrôle sur ses personnages, c’est simplement parce que ces derniers ont une personnalité, un caractère très construit, qui les empêche de faire telle ou telle action, au risque de rendre les péripéties invraisemblables. Plus vous construirez vos personnages, plus ils seront réels, et moins vous pourrez leur faire faire ce que vous voulez. Pour que votre histoire soit crédible, vos personnages ne pourront agir que selon le caractère que vous leur avez construit…
Référence : Profession romancier d’Haruki Murakami, 10/18
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