Écrire mais pour qui ? - Atelier d'Albion

Écrire, mais pour qui ? Pour qui écrit-on si ce n’est pas pour soi ? Pour les lecteurs ? Les écrivains de littérature blanche diront « non » la plupart du temps. Même s’il est toujours hasardeux de ranger les écrivains dans des cases, la littérature blanche et la littérature grand public ont des avis divergents en ce qui concerne la réception du livre et l’importance du lecteur au moment de l’écriture du livre. On pourrait croire que la question de la place du lecteur dans le processus d’écriture oppose les écrivains littéraires aux écrivains populaires, mais le débat est plus subtil que cela.

Un certain nombre des écrivains du premier groupe dit souvent qu’il écrit pour lui sans penser au public, que la littérature est son espace de liberté. Y penser pourrait bloquer le processus de création et les pousser à se censurer. En ayant une liberté totale, ils évitent donc une autocensure. Les écrivains du deuxième groupe disent le contraire : ils écrivent évidemment pour leurs lecteurs. Ils écrivent donc pour le plaisir et pour la passion de l’écriture, mais en pensant à la réception. C’est-à-dire que tout est construit. Rien n’est laissé au hasard. Ils ne pensent pas au lecteur à proprement parler au moment de l’écriture, mais le roman n’est pas écrit au fil de la plume. Il est réfléchi, travaillé, élaboré avec un plan, de manière à ce que le lecteur ne puisse plus lâcher le roman. Tout y est construit de manière à ce que le lecteur ait aussi sa place. Le lecteur doit pouvoir exprimer et développer ses sentiments à la lecture du roman. Il va avoir peur, être bousculé, ému, heureux, triste…

Roland Barthes est plus subtil et pense que « celui qui écrit peut se projeter dans le sentiment du lecteur éventuel, et écrire comme si au moins un lecteur avait besoin de ce texte ». Umberto Eco disait pour sa part ne pas appartenir à « la clique des mauvais écrivains qui prétendent n’écrire que pour eux-mêmes ». Le message est clair.

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