À l’occasion de la sortie de son nouveau roman Le Danseur oriental, j’ai eu le plaisir de rencontrer Metin Arditi autour d’un déjeuner de lecteurs. Ce roman est le premier tome d’une trilogie, dont les deux autres paraîtront dans les prochains mois aux éditions Grasset. Grâce à cette rencontre, nous avons pu entrer dans les coulisses de l’écriture de Metin Arditi.
Un personnage qui a plusieurs vies
Gülgül est le personnage principal du Danseur oriental, mais pas seulement. Il est aussi un personnage secondaire d’au moins quatre romans de Metin Arditi. Ce jeune lutteur est le fils caché du calligraphe du sultan, né juif et converti à l’islam. Ce jeune Gülgül, que l’on va voir grandir, est en réalité un personnage aimé de l’écrivain. Il l’a dépeint plusieurs fois, en toile de fond, avant de vraiment lui donner corps dans ce nouveau roman. Souvent, je dis à mes étudiants en atelier d’écriture à la Sorbonne, que la vie d’un personnage commence avant la première page du roman, et qu’elle se termine après la dernière page. Désormais, je pourrai aussi leur donner cet exemple d’un personnage qui traverse une œuvre. D’un personnage qui vit plusieurs vies au gré des romans.
Quand l’histoire intime révèle l’Histoire
De 1912 à 1935, Le Danseur oriental nous fait tourbillonner dans une Constantinople en pleine évolution. Avec la volonté d’occidentaliser le pays, Atatürk bouscule sa population, ses repères, ses habitudes, et surtout sa culture. Est-ce seulement réalisable ? Metin Arditi, au travers d’une vaste galerie de personnages, nous plonge dans la vie d’hommes et de femmes qui cherchent leur place. Les émotions et les valeurs morales s’entrechoquent : vengeance, justice, orgueil, souci du regard d’autrui. La force de ce roman réside dans cette multitude d’émotions qui nous traversent, mais aussi dans l’absence de didactisme. Metin Arditi nous parle de l’Histoire de la Turquie avec subtilité, au travers de l’histoire intime de chacun de ses personnages. Ce sont eux qui nous donnent une vision kaléidoscopique de cette période historique.
Une histoire qui se répète. Alors que nous lisons ce roman en France, en 2025, nous ne pouvons pas passer à côté d’une forme de fatalité. Outre le fait que l’histoire se répète pour les personnages, comme un cycle de génération en génération, l’histoire se répète aussi à l’échelle du pays. Les populations oublient. Les politiques aussi. Le sous-texte de ce roman soulève une question sociale universelle et intemporelle. Comment ne pas oublier le passé ?
Medin Arditi a passé quatre ans à construire cette trilogie. Un jeu avec les formes. Un rythme sans relâche. Une véritable masterclasse de narration sur 400 pages. Et un plaisir immense de lecture. Vivement la suite…
Référence :
- Le Danseur oriental de Metin Arditi (Grasset)
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