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©Elise Thiébaut

Cette semaine, le Journal d’Albion vous propose d’entrer dans les carnets d’Elise Thiébaut. Écrivaine et essayiste, elle nous parle de son rapport au carnet, et de son dernier livre, L’Amazone verte, sur l’écrivaine écoféminite Françoise d’Eaubonne, qui vient de paraître aux éditions Charleston. Entretien. 

Combien avez-vous de carnets au quotidien ?

Au moins deux, et jusqu’à cinq selon les moments : un pour les affaires courantes, où je peux noter aussi bien mes comptes que mes rêves ou des notes d’entretiens ou de réunion, et un pour le livre en cours. Pour chaque projet, je vais avoir cinq ou six carnets numérotés, dans lesquels je note au fur et à mesure ce que je lis et vois sur le sujet qui m’occupe, ou mes réflexions liées au livre, les ébauches de plans, idées de titres, etc.

Quand et comment les utilisez-vous ? 

A peu près chaque jour, suivant mes besoins. Mes notes sont très souvent en vrac et pas toujours réutilisables. C’est paradoxal, je sais, mais j’oublie ce que j’écris. Une fois que j’ai terminé un livre, je dois le relire plusieurs fois pour pouvoir en parler.

Qu’aimez-vous dans ce rapport à l’écriture manuscrite ? 

Il y a une intelligence de la main qui existe aussi quand on écrit à l’ordinateur, mais sous une forme différente. On pèse davantage ce qu’on écrit à la main parce qu’on ne peut pas l’effacer. J’aime la façon dont mon corps est engagé dans l’écriture.

Avez-vous des rituels d’écriture ?

Pas vraiment. J’aime plutôt écrire la nuit ou tôt le matin, mais ça dépend des circonstances, des saisons et des lieux. Je ne suis pas du tout une femme d’habitude. Pour moi, chaque jour est unique. Je n’ai pas d’horaires fixes, j’ai beaucoup de mal à me plier à une discipline, ce qui n’empêche que je travaille beaucoup et de façon complètement brouillonne, vu de l’extérieur, mais très efficace en général, parce que je fais ça à fond. Je suis souvent dans un état second, c’est très spécial et parfois pénible pour mon entourage qui s’accommode difficilement de cette présence absente. Et même pour moi, c’est parfois pénible de vivre dans un livre. J’ai l’impression qu’on me vole ma vie.

Les carnets d’Elise Thiébaut / ©Elise Thiébaut

Pouvez-vous nous parler de votre dernier livre, L’Amazone verte, qui vient de paraître aux éditions Charleston ?

Il s’agit d’une biographie subjective de l’écrivaine écoféministe Françoise d’Eaubonne (1920-2005), une personnalité hors-normes qui a publié plus de cent ouvrages, forgé trois mots qui sont entrés dans le langage courant – phallocrate, écoféminisme et sexocide –, qui a été résistante, communiste, féministe dès 1949 avec Simone et de Beauvoir, puis militante anticolonialiste, cofondatrice du MLF et du Fhar (Front homosexuel d’action révolutionnaire) alors qu’elle ne se définissait pas comme homosexuelle elle-même, et enfin militante anti-nucléaire qui est allée jusqu’à poser une bombe à Fessenheim… Une personnalité haute en couleur, avec une dominante de vert !

Quel est le livre qui vous a donné envie d’écrire ? 

Tous les livres m’ont donné envie d’écrire, depuis toujours. J’ai commencé à inventer des histoires dès six ou sept ans, avec une prédisposition pour le fantastique. La Métamorphose, de Kafka, était mon modèle. Mais j’avais aussi, dans un genre très différent, une passion pour Voltaire, dont le style virevoltant me fascinait, et j’ai passé des années à tenter d’écrire des nouvelles comme celles de Katherine Mansfield. La dernière chose à laquelle je m’attendais était de finir par me réaliser en écrivant plutôt des essais, même si les miens ont une dimension de récit ou d’intime. On les qualifie d’ailleurs souvent de romans, par erreur, et je ne rectifie pas.

Actualités d’Elise Thiébaut :
  • L’Amazone verte chez Charleston
  • Survivre au sexisme ordinaire chez Librio (Collectif)
  • Parution poche de Mes ancêtres les gauloises chez Pocket
Quelques idées de carnets pour vos prochains romans, à découvrir sur notre papeterie en ligne :