Cette semaine, le Journal d’Albion vous propose d’entrer dans les carnets d’Olivia Elkaïm. Ecrivaine et journaliste, elle revient sur les coulisses de l’écriture de son dernier roman, Le Tailleur de Relizane. Il vient de paraître en cette rentrée littéraire aux éditions Stock. Entretien.
Tu as plusieurs activités, tu es à la fois journaliste et écrivain. Comment organises-tu cela dans tes carnets au quotidien ?
J’ai un carnet rouge sur lequel j’ai inscrit « Octobre-novembre 2020 », qui me sert exclusivement à prendre mes notes de journaliste. J’ai aussi un agenda-carnet rose, avec un semainier, qui me suit tous les jours en 2020-2021, sur lequel je note mes rendez-vous, mes obligations professionnelles ou pour mes enfants… Enfin, j’ai aussi un petit carnet, que je range dans une trousse brodée avec le mot « Amour ». À l’intérieur, il y a un masque, des câbles d’iPhone, des crèmes pour les mains, du gel hydroalcoolique et un tout petit carnet sur lequel sont dessinés des baleines et un bateau, que j’ai acheté chez Monsieur Papier, une papeterie-café qui se trouve à Plogoff, et qui est un lieu magnifique. Dans ce petit carnet, je note mes idées de livre. Là, sur les dernières pages, on trouve quelques mots sur l’écologie, sur un chien… Ça ne donne aucune idée de ce que je vais écrire ! (Rires) On trouve également quelques notes sur mon livre Le Tailleur de Rélizane pour ce que je vais dire promo.
Dans ce petit carnet, écris-tu juste des notes ou tu écris aussi des passages de ton roman ?
Non, pas dans celui-ci. Je note juste des mots, des idées. C’est incompréhensible pour quelqu’un qui n’est pas moi. Ça m’arrive en revanche d’écrire mon roman à la main sur carnet, mais ce ne sont que de courts passages. Pour Le Tailleur de Relizane, j’ai pris des notes dans 5 carnets différents : « Retour en Algérie 1 », « Retour en Algérie 2 », 3, 4 et 5. Dedans, ce sont des notes de conversations avec mon père, des tantes, des oncles, Benjamin Stora ou encore Aldo Naouri. Ce sont des carnets très riches, avec beaucoup de matière et des passages de textes que je recopie et que je retravaille sur ordinateur.
Tu as donc quand même besoin de passer par cette étape de l’écriture manuscrite.
La phase carnet est capitale. Je ne me jette jamais dans l’écriture sur ordinateur sans avoir une phase où je prends des notes dans un carnet. C’est aussi ma déformation journalistique. J’ai le même processus pour écrire mes papiers.
Et les carnets que tu utilises pour ton travail journalistique justement, comment les utilises-tu ?
Je suis moins fétichiste avec ceux-là. Contrairement à mes carnets d’écriture que je garde depuis que j’ai l’âge de 15 ans, mes carnets journalistiques, je les jette tous les deux ou trois ans.
Les carnets d’Olivia Elkaïm / ©Olivia Elkaïm
Pourquoi tu ne les gardes pas ?
Ça n’a aucun intérêt. Honnêtement, les notes prises pendant la présidentielle 2017 sur François Fillon, ça ne me sert à rien… Ça n’a pas d’utilité. En revanche, mes carnets pour Le Tailleur de Relizane, ça a un véritable intérêt de les garder. J’ai une promotion importante pour mon livre, et je me suis souvent replongée dans mes carnets pour comprendre comment j’avais travaillé sur mon roman.
Grâce aux carnets, tu retrouves les coulisses ton travail.
Je reconstitue le fil de mon travail, oui. J’ai eu un grand article dans Le Monde, qui racontait l’histoire du livre, et j’ai montré à la journaliste tout ce que j’avais écrit dans mes carnets. Les carnets sont la mémoire du texte.
As-tu des rituels d’écriture ?
Auparavant, j’avais des rituels. J’écrivais dans une chambre de bonne toute petite, avec juste un puits de lumière, sans fenêtre. Sauf pour Le Tailleur de Relizane. C’est un livre que j’ai écrit partout, tout le temps, dans les trains, les gares, les aéroports, les avions. Je n’ai pas eu besoin de ritualiser l’écriture de ce livre. Et c’est d’autant plus amusant que c’est un livre sur l’exil. Je me suis mis dans la peau de l’exilé pour l’écrire, ou plutôt du voyage. Pendant l’écriture, je suis allée à Lisbonne, en Bretagne, en Grèce, dans le Var, au Maroc. À chaque fois, j’apportais mon texte. Et pour en revenir aux rituels, à partir du moment où le texte est dans l’ordinateur, à partir de 50 ou 80 pages, j’ai besoin d’imprimer et de travailler sur le manuscrit. J’ai donc plusieurs phases : les carnets, l’écriture sur ordinateur et le travail sur le manuscrit.
Comment es-tu venue à l’écriture ? Est-ce que c’est une éducation ou bien des livres qui t’ont donné envie d’écrire ?
Il y a clairement des livres qui me donnent envie d’écrire. J’ai eu une forte appétence très jeune pour la Bibliothèque verte, Alice détective. Je les dévorais, d’ailleurs, je me prenais pour Alice. Ce qui est marrant, c’est qu’elle est détective et que je suis devenue journaliste. Ce n’est pas le même métier, mais il y a tout de même ce côté enquête. L’écriture me vient vers 7 ou 8 ans, avec la croyance qu’écrire des livres, c’est recopier mon livre d’histoire gréco-romaine. Ça me passionne. J’ouvre le livre, un cahier, et je recopie en disant : « Je suis écrivain. » Depuis, j’ai compris que l’écriture n’est pas du plagiat. (Rires) Mais il y a l’idée du palimpseste, d’écrire sur ce que les autres ont écrit. Notre écriture est toujours nourrie d’autres textes. Entre 15 et 20 ans, je découvre Marguerite Duras. Et plus récemment, j’ai des livres très importants comme celui Jonathan Safran Foer, Extrêmement fort et incroyablement près, ou Les Disparus de Daniel Mendelsohn.
Pour terminer, peux-tu nous donner l’un de tes derniers coups de cœur littéraire ?
J’ai un choc absolu pour Ce qu’il faut de nuit de Laurent Petitmangin (La Manufacture de livres). Je suis séchée. C’est très puissant, très fort. C’est l’histoire d’un père et de ses deux fils, avec une langue très originale, très singulière. C’est un livre magnifique. Je pleure à chaque page ! Je suis dans un état de transe avec ce livre.
Actualité d’Olivia Elkaïm :
- Le Tailleur de Relizane, aux éditions Stock
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