Gatsby le magnifique, ce classique de la littérature américaine, m’a fait penser aux romans du britannique Somerset Maugham. Gatsby possède ce petit quelque chose du drame et du tragique qui rôde toujours un peu dans les hautes sphères de la société, où, pour reprendre un célèbre cliché, l’argent ne fait clairement pas le bonheur. L’amour se déplace, toujours en les lignes. Les secrets et les souvenirs aussi. Ce roman a une certaine élégance, une poésie indéniable. On y tourne les pages avec plaisir. Néanmoins, on ne se refait pas : ce dont je me souviendrai le plus dans ce Gatsby, ce sont les pages hors du roman, placées à la fin du livre, qui révèlent des lettres échangées entre Francis Scott Fitzgerald et son éditeur Max Perkins.
Gatsby flou
On peut y lire que Fitzgerald notait bien de ne plus faire lire à Zelda (ni à quiconque) ses textes tant qu’ils ne seraient pas terminés. Mais on y apprend aussi que Perkins trouvait le personnage de Gatsby flou, alors qu’il aurait pu reconnaître Tom Buchanan dans la rue. Et Fitzgerald d’avouer qu’il n’avait aucune idée de ce « à quoi ressemblait Gatsby ni ce qu’il faisait ». « Et vous l’avez senti », dit-il à Perkins. L’inconscient collectif pense souvent que ces grands classiques se sont écrits avec fluidité et talent. Lire les archives permet de prendre conscience que, même chez Fitzgerald, un personnage non travaillé se voyait.
Fitzgerald, les chiffres et le lectorat
Enfin, on y parle aussi chiffres, avances, chèques, et surtout : lectorat. Le 24 avril 1925, Fitzgerald est déprimé et pense que si son livre est un échec commercial, ce sera soit à cause du titre qu’il trouve médiocre (à lire tous ces échanges, il a visiblement toujours été contre Gatsby le magnifique), soit à cause d’un élément des plus triviaux : « Deuxièmement et c’est capital : le livre ne contient aucun personnage féminin d’envergure et, aujourd’hui, ce sont les femmes qui dominent le marché romanesque. Je n’ai pas l’impression que la fin tragique joue un rôle particulier. » Eh oui, même Fitzgerald pensait à son lectorat !
Référence : Gatsby le magnifique de Francis Scott Fitzgerald, dans sa version au Livre de poche
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