Les petites mythologies des écrivains

« La pipe de François Sureau finira par être aussi fameuse que celle de Magritte. Gamin, il voulait devenir écrivain, et est bientôt tombé sur une photo de Rimbaud avec une pipe en terre. Il a couru s’en acheter une. “Je n’avais rien vécu, je n’avais rien connu, rien à dire qui vaille, sourit le vieux jeune homme. Je voulais la panoplie de l’écrivain, et dans cette panoplie, il y avait la pipe.”» Les lecteurs adorent les petits détails qui fondent la mythologie d’un écrivain.

Mettre en une d’un magazine Michel Houellebecq avec son corgi Clément est plus efficace que toutes les meilleures punchlines. On connaît la cafetière d’Honoré de Balzac, les paperolles de Marcel Proust, mais aussi l’obsession de Françoise Sagan pour les casinos et les belles voitures, ou encore les chats de Colette et sa nécessité d’écrire sur du papier bleu. On connaît les mille et un chapeaux d’Amélie Nothomb, son goût pour le champagne et sa mémoire infaillible, la passion de Tatiana de Rosnay pour la couleur turquoise et les écrivaines britanniques Daphné du Maurier et Virginia Woolf, ou encore le cabinet de curiosité qui sert de bureau à Maxime Chattam. On adore aussi les corgis de Stephen King, la passion des cimetières de Nathalie Rheims ou encore l’amour de la Bretagne de Yann Queffélec.

Ces petites mythologies sont comme les petites phrases des politiques, elles suivent l’auteur tout au long de leur carrière, souvent parce qu’ils en jouent et s’en amusent avec le lecteur. Elles sont des objets de la vitrine de l’auteur, elles renforcent son mythe et sa posture. On le connaît un peu mieux grâce à ces intimités, justement parce qu’elles nous font entrer chez lui. On a alors l’impression de mieux le connaître. Ces petites mythologies sont aussi une manière de renvoyer le lecteur à ses propres passions : « J’adore Virginia Woolf. Si Tatiana de Rosnay aime Virginia Woolf, alors moi aussi, peut-être que j’aimerais Tatiana de Rosnay ». La boucle est bouclée. Et vous, quelles sont vos petites mythologies préférées ? 

Référence : 

• Franck Johannès, « François Sureau – “Ma France est traversée par l’étranger” », Le Monde des livres, vendredi 29 mai 2020

Pour redécouvrir notre entretien avec l’écrivaine Tatiana de Rosnay, c’est par ici.

Quelques idées de carnets sur notre papeterie en ligne, pour écrire votre propre mythologie :